Jour 11

Chère maîtresse,

aujourd’hui, j’ai fait un affreux cauchemar. Mes mains sont encore moites, mon cœur palpite trop vite. Trigonométrie…Rien que son nom me glace le sang. A quoi sert vraiment cette matière imprononçable? Parce que franchement, au bureau, hormis les ORL, je ne vois pas bien qui parle de sinus (et cosinus) à la machine à café…

Seulement voilà. Aujourd’hui, j’ai eu une révélation. Les cieux se sont ouverts devant moi et m’ont parlé trigo. Aujourd’hui, nous avions musique. En ligne. Via whatsapp. Quel rapport ? Ah, chère maîtresse, ne soyez pas si terre-à-terre. C’est une question de plan ! Imaginez. Vous êtes flûtiste. Vous prenez votre téléphone, vous le posez sur le pupitre, vous jouez, le prof voit, le tour est joué. Plan 2D. Remplacez le pipeau par une batterie… Le plan 2D coince, on ne voit rien. Et vlan, sinus et cosinus, les Laurel & Hardy de la géométrie…

Imaginez: quel triangle tracer entre la batterie, le téléphone, – qui doit la voir entièrement-, et le pupitre, le tout en restant audible ? Mes mains redeviennent moites, mon cœur palpite trop vite. Parce que quand on achète une batterie, on ne pense pas à la prendre au format instagram… Alors on prend le tél, on l’élève, ça ne passe pas, on le rabaisse, ça ne passe plus, on le remet, on n’entend plus, on le rapproche… On se prend les pieds dans le fil, on sort enfin, laissant l’enfant en extase devant sa caméra. Il ressort une demi-heure plus tard en se fendant la poire, « c’était trop top, on a tellement joué »… Et c’est là qu’on se rend compte qu’on n’avait pas allumé la batterie..

Ah, maîtresse, je n’en peux plus, mes sinus me font mal, mes cosinus aussi, je souffre tant: excès de trigonométrie, il paraît que ça arrive. Je tremble en attendant le programme de demain. J’ai bien cru voir Molière, le Malade imaginaire, mais en même temps, pour des petites sections, je me pose des questions.

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