Jour 16

Chère maîtresse,

Aujourd’hui c’était Verdun… J’étais très étonnée, passer des Huns à Verdun, c’est quand même peu commun. J’ai eu beau lire et relire le programme du jour, cela n’y était pas. Et pourtant je vous l’assure, aujourd’hui c’était Verdun… La guerre a explosé pour un vulgaire jouet que trois enfants se disputaient. L’enfermement, le confinement, le mauvais temps, voilà comment un conflit naît.

Il faut dire, les parents interdisent toute activité ! « Qui veut faire du base-ball dans le salon ? Et accrobranche sur la rampe ? Du skateboard dans l’escalier ? » Non, non et non, c’est toujours non… Sous mon regard effaré, trois enfants se disputent un jouet, s’avancent menaçants, portant sur le front une mâle assurance…Ils partent à trois, mais par un prompt renfort d’animaux Schleich et de munitions, ils se voient 300 en arrivant au front. Les voilà qui attaquent, les projectiles volent, des lions, des schtroumpfs, des loups, des ours, et même un pangolin. Et qu’ils se tirent les cheveux : « C’est à moi, je te l’ai dit ». Je vois, sous mes yeux terrifiés, le canapé poussé, une embuscade se tendre. Un autre se tapit derrière le gros ordi. Un farfadet surgit, déguisé en cow-boy, et hurle tant et plus qu’il ne lâchera rien.

J’implore de cesser, je demande l’armistice, brandissant bien naïvement des feuilles d’exercices. Rien n’y fait. Le cimeterre au poing, ils ne m’écoutent pas. Je me tais, je saisis un grand sac et ramasse sans un mot les munitions à terre. Tout y passe. Voyant à leur pied tomber tous leurs soldats, les enfants capitulent, ils demandent le chef, je me nomme, ils se rendent. Et le combat cessa, faute de combattant. Le salon rangé, le canapé repoussé, les exercices achevés, les voilà qui se lamentent : « Tu vois bien qu’on ne peut rien faire, pour une fois qu’on s’amusait. ».

Ah maîtresse, Verdun, les fractions, les divisions, pour moi, c’est trop stressant : demain, pourriez-vous nous donner matière plus reposante ?

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